Vous, misérables qui jamais n’accomplirez quoi que ce soit, faites bien attention…24 décembre 201124 décembre 2011Tetho

Billet garanti sans révélation sur la série et son contenu. De toute façon avant d’arriver a un niveau de connaissance satisfaisant de la série il va falloir passer un peu de temps dessus, comme Utena ou Evangelion en leurs temps, donc autant éviter de se ruer vers des analyses qui seront invalidées d’ici quelques mois.

J’aime placer l’âge d’or de l’animation japonaise à la télévision dans la deuxième moitié des années 90. A partir d’Evangelion et pendant 5 ans chaque année on a vu au moins un anime original du plus haut pédigrée débarquer pour nous rappeler la force de l’animation japonaise en tant que média (dans l’ordre : Evangelion, Nadesico, Utena, Fancy Lala, Lain, Cowboy Bebop et Ima, soko ni iru boku). Et le reste de la production ne déméritait pas entre des GaoGaiGar et des Gasaraki. La décennie suivante ne fut pas à la hauteur, malgré des perles comme Princess Tutu ou Haibane Renmei force est de constater un réel manque de ces animes originaux qui atteignent une certaine perfection, on a souvent croisé du bon et du très bon, comme Last Exile, Kamichu! ou Eureka seveN, mais rarement on a vu de ces animes qui de par leur essence même sont les plus nobles possible. Et c’est finalement l’année 2007 qui y brille le plus avec le fantastique duo Gurren-Lagann et Idolmaster : Xenoglossia Dennô Coil.
Aujourd’hui c’est clair, Mawaru Penguindrum est un de ces animes-là, sans nul doute possible. Et dans son ensemble 2011 fut une année exceptionnelle pour les animes à la télévision, portée par des titres de grande qualité comme Madoka Magika, Ano Hana à Blood-C Last Exile – Ginyoku no Fam.

Attendue et crainte à la fois car elle marquait le retour à la création et la réalisation après 12 ans de friche artistique d’Ikuhara Kunihiko, génial créateur d’Utena, Mawaru Pengruindrun s’impose sans aucun problème comme étant la série TV de l’année 2011. Ikuhara réussit son coup une seconde fois, il montre ce que c’est que de poser ses couilles sur la table et de créer quelque chose qui est là pour marquer, et rappelle que si le talent ça se travaille, le génie lui demande une vraie réflexion pour savoir penser « hors de la boîte ». Alors qu’un Urobuchi Gen peine à expliquer le sous-texte de Madoka Magica, Ikuhara gère sans problème ses références aux attentats du 20 mars 1995. Après qu’Enokido Yôji ait tenté de refaire Utena, mais avec des robots, dans Star Driver et a échoué misérablement, Ikuhara nous montre qui était derrière le génie flamboyant d’Utena en co-écrivant le scénario de tous les épisodes de Penguindrum afin de maîtriser au mieux son histoire. Alors que des séries comme Steins;Gate sont trop occupées à contempler la culture otaku et son nombril, Ikuhara va piocher ses inspirations chez Miyazawa Kenji, Murakami Haruki, dans le rock d’ARB… La série est en plus incroyablement planifiée et rien n’y est laissé au hasard, les détails ont un sens, du pansement du Manchot n°1 aux couleurs bariolées de la maisons des Takakura. Même les génériques de fin, pourtant des chansons qui ont plus de 20ans réussissent à être pertinents vis à vis du contenu des épisodes qu’ils referment. Il laisse aussi s’exprimer les personnes à qui il délègue ses épisodes, ce qui donne de vraies personnalités à ces épisodes. La série a proposé 3 épisodes solo réalisés, storyboardés et animés par une seule personne, une vraie gageure.  Ainsi  le 9eme épisode a été réalisé par Takeuchi Nobuyuki, directeur artistique sur Bakemonogatari a su lui donner une esthétique Shaftienne avec ces personnages qui parlent en penchant la tête vers l’arrière, quand à Gotô Keiji, créateur d’Uta Kata ou Kiddy Grade et charadesigner de Nadesico, il s’est chargé seul des épisodes 10 et 19 qui ont justement été tant décriés pour leur style légèrement hors modèle. A ces 3 épisodes particuliers on peut ajouter le 18eme, par Yamauchi Shigeyasu (Saint Seiya, Casshern Sins…) ou le 20 qui marque les débuts à la réalisation d’Hayashi Akemi, animatrice à la Gainax, et qui a offert un superbe épisode avec des teintes grisâtres incroyables de mélancolie et de spleen. En fait mon seul regret majeur sur la série fut de ne pas voir d’épisode par Mamoru Hosoda, ce dernier avait eu un rôle important sur Utena et y avait storyboardé 7 épisodes, le voir réaliser un épisode de Mawaru Penguindrum aurait eu un sens.
La réussite artistique de Penguindrum n’est pas un hasard, c’est le fruit du travail d’un créateur qui savait ce qu’il voulait et a su s’entourer comme il fallait pour y arriver. Et même si par moment il s’est adonné à de vrais moments d’autor-service, comme via les scènes de transformation de la Princess of the Crystal qui nous rappellent qu’Ikuhara est un réalisateur qui a fait sa carrière avec les magical girls, jamais il n’a choisi la solution de facilité, jamais.
Au fond ce « Vous, misérables qui jamais n’accomplirez quoi que ce soit, faites bien attention à ce que j’ai à vous dire! » que la Princess of the Crystal déclame à chacune de ses apparition se destine peut-être au reste de l’industrie, comme pour leur rappeler ce que peut donner une série quand on s’en donne les moyens…

2012 s’annonce à son tour comme une excellente année en terme d’animation japonaise , que ce soit à la télévision ou au cinéma, et tout ce que je peux espérer c’est qu’on y verra un nouvel anime du calibre de Mawaru Penguindrum.